Sylvie GRANOTIER : La rigole du diable.

Sylvie GRANOTIER : La rigole du diable. Collection Suspense ; éditions Albin Michel.

Jeune avocate Catherine Monsigny vient de remporter sa première victoire, pardon, son premier procès. Son client, Cédric Devers, accusé par une accorte et quinquagénaire serveuse de bar pour coups et blessures alors qu’elle l’avait harcelé après une séance de simulacre de reproduction, est acquitté. Aussitôt après, toute guillerette, elle enfourche son scooter et rend visite à Daniel dans le quartier de la Goute d’Or. Il milite dans une association de défense pour le droit pour tous. Elle récupère le dossier de Myriam Villetreix, née N’Bissi, soupçonnée d’avoir assassiné son vieux mari à l’aide de cyanure. Ensuite direction le bureau dirigé par Renaud, son patron, qui enfin lui confie une affaire importante. Myriam, avait été ramenée du Gabon dans les valises de ses futurs employeurs qui en avaient fait leur esclave. Elle avait profité de ce que ses « maîtres » étaient fascinés par le reportage des avions destructeurs du 11 Septembre 2001 pour s’échapper et se réfugier auprès de Daniel. Une annonce avait attiré l’attention de Gaston, vieux gars célibataire de la Creuse, et ils avaient uni leurs destins, pour le bonheur de tous, sauf des cousins creusois. Quelques années plus tard, Gaston décédait d’un arrêt du cœur et Myriam héritait de tout. Et c’est peut-être à cause de cet héritage qui leur passait sous le nez que plus tard les cousins avaient accusé Myriam d’avoir assassiné son mari à l’aide de cyanure. La boite, qui était rangée dans la grange de l’un des cousins, avait été retrouvée dans la cuisine, domaine depuis le mariage, de Myriam. Pourtant le docteur avait signé le permis d’inhumer sans broncher tout comme il avait signé celui de sa mère décédée comme Gaston d’un arrêt du cœur. Depuis Myriam est enfermée dans la prison de Guéret, clamant son innocence. Catherine est toute heureuse d’annoncer à son père, médecin retraité, qu’elle va plaider aux assises, à Guéret. Apparemment il connait la région. Il est son seul lien, sa mère ayant été assassinée alors qu’elle était encore toute jeune, mais il réside loin de Paris. De sa mère elle ne possède qu’une photo qu’elle a découverte dans un livre et de vagues souvenirs qui lui remontent parfois à la surface. Pourtant dans cette région de la Creuse où elle se rend, elle croit reconnaître fugacement des endroits. Elle fait la connaissance d’un journaliste localier, d’un voisin de Gaston et Myriam qui vont l’aider dans ses démarches, et fournir un point de chute pour ses fréquents voyages. Et à Paris elle retrouve Cédric qui devient son amant.

Presque à son insu Catherine se trouve propulsée dans un rôle de catalyseur, dans cette intrique où elle se trouve prise comme dans un étau. C’est parfois un voyage entre réel et rêverie, à cause des souvenirs de notre héroïne qui se propulsent et deviennent insistants. Mais ce roman c’est aussi le royaume des couleur : les couleurs bigarrées de l’automne, fauve, jaune, vert, rouge, brun, les couleurs chamarrées utilisées par Myriam pour décorer la maison de Gaston, les roses rouges qui parsèment l’enquête de Catherine, le rayon vert qu’elle a aperçu toute jeune dans sa poussette dans le parc où sa mère a été assassinée et qui lui revient comme une obsession, le noir des robes d’avocat, le blond des prétoires, le blanc d’un doudou ou d’une écharpe, le jaune d’un éclat de soleil, d’une robe ou d’un carton enfoui, un mariage bicolore, et cerise sur le gâteau, si l’on peut dire, le prénom de sa mère : Violet. Sylvie Granotier possède une écriture fine, élégante, racée au service d’une histoire complexe

Paul Maugendre

 

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