PARIS NOIR. Recueil collectif de nouvelles présenté par Aurélien MASSON.

Polar, Editions Asphalte.

PARIS NOIR. Recueil collectif de nouvelles présenté par Aurélien

A première vue, Paris Noir ne pourrait être qu’un simple recueil de nouvelles, comme bien d’autres, dont les auteurs font partie du gratin de la littérature noire, Didier Daeninckx, Jean-Bernard Pouy, Hervé Prudon ou Marc Villard ; d’autres se forgeant doucement un nom sur les grilles du Panthéon de ce genre littéraire comme DOA, Jérôme Leroy, Laurent Martin, Patrick Pécherot ou Chantal Pelletier ; les derniers possèdant la clé et n’ayant plus qu’à entrouvrir la porte tels Salim Bachi, Dominique Mainard et Christophe Mercier. Mélange heureux d’anciens prenant sous leurs ailes protectrices ces oisillons qui ne demandent qu’à s’ébrouer avant de s’envoler sous l’œil bienveillant et tutélaire d’Aurélien Masson, patron depuis 2005 de la Série Noire.

Le propos de ce recueil est de montrer Paris comme on ne le voit jamais sur les cartes postales. Un Paris inconnu des touristes qui passent sans voir les quartiers de la capitale, se précipitant sur les icones obligées. Des quartiers qui parfois ressemblent à de petits villages, proches des centres dits d’intérêt, et auxquels on ne prête guère attention. Chaque écrivain possède ses points d’ancrage (d’encrage ?), ses quartiers de prédilection et nous guide dans un Paris méconnu et que nous côtoyons, parisiens, banlieusards ou simples touristes avides de découvertes. Ainsi la gare du Nord, et ses cariatides aux gros seins qui regardent passer les voyageurs pressés. Qui les scrutent vraiment et qui connait les à-côtés de cette bâtisse, le canal Saint-Martin, et ses agents de l’état qui se déchirent sur fond de sécurité du territoire ? Ainsi les Halles et la Rambut’ (la rue Rambuteau) chères à Marc Villard qui explore le monde des prostituées, de la drogue et des flics pourris, et ses clubs de jazz. Ainsi le Quartier Latin dans lequel deux Maghrébins imaginés ( ?) par Salim Bachi qui ne sont pas vraiment intégrés malgré toutes les connaissances didactiques du Grand-Frère. Des images rémanentes, des retours sur une vie antérieure pour le héros narrateur de Laurent Martin, dans le quartier Daumesnil, narrateur qui est parti de chez lui dix ans auparavant et qui revient pour le mariage de sa sœur. Il aurait mieux fait de rester dans son sous-marin ou le garage dans lequel il travaille maintenant. Tout ça pour faire plaisir à la famille ! Et ce Chinois qui pensait déguster la bonne cuisine française et qui passera à la casserole (c’est une image) par la volonté d’une ancienne nageuse tout en muscles et en amours déçues qu’elle aimerait pouvoir déguster à sa convenance.

Lieu récurrent : les cafés, dans lesquels les habitués se mêlent avec méfiance aux protagonistes de passage qui ne cherchent pas à s’encanailler comme le pékin de province, mais qui résolvent plus ou moins bien leurs petites affaires, leurs amours, leurs échecs, leur rancunes, leurs mystères.

Mais attention, ceci n’est pas un guide touristique à l’usage de curieux en mal de sensations fortes. Vous ne rencontrerez pas ses personnages qui se fondent dans la foules, vous n’entrerez pas dans leur intimité, professionnelle, amoureuse, vous passerez peut-être près d’eux mais vous ne les reconnaitrez pas. Laissez-vous plutôt porter par ses histoires sorties de l’imagination d’auteurs qui grattent le vernis pour nous dévoiler l’envers du décor.

Et comme en France, tout se termine par des chansons, parait-il, les auteurs ainsi que l’anthologiste ont concocté une playlist que les lecteurs pourront écouter en dégustant ces nouvelles sur http//asphalte-editions.com/blog/ .

Enfin, et si j’ai gardé cette information pour la fin, pour la bonne bouche comme on dit, c’est parce qu’elle est d’importance, cet ouvrage est la réédition d’un recueil paru en 2007… aux Etats-Unis ! Mais Aurélien Masson nous en dit plus dans ses deux introductions, l’une consacrée à l’édition américaine, l’autre à la version française.