Jan JOUVERT : Déménage

Polar Editions du Barbu

Jan JOUVERT : Déménage

Lorsqu’il se réveille attaché par une corde à un radiateur en fonte, dans un appartement délabré, Marc se demande bien ce qui lui est arrivé et ce qu’il fait là. Tout ça parce qu’il a accepté de revoir on ex, de boire un café accompagné de croissants. Plus un petit cachet en douce, fourni à son insu par Mélinda qui ne lui pardonne pas de l’avoir larguée pour une autre, une choriste nommée Laure. Car Marc, embauché comme attaché de presse d’un label discographique branché, fasciné par l’univers du showbiz, a changé du tout au tout du jour au lendemain, devenant un être cynique reniant ses anciennes amours.

Marc s’est donc entiché de Laure, il l’aime déclare-t-il avec force, et Mélinda va le torturer mentalement, psychiquement, physiquement, lui faisant payer ce qu’elle considère comme un forfait. Tout à tour câline ou tortionnaire, Mélinda joue avec les nerfs de Marc, l’abandonnant à son sort afin de chercher quelques provisions de bouche, le nécessaire pour se sustenter et s’abreuver. Il tente bien de limer la corde qui le relie au radiateur, et à s’enfuit, mais en pure perte. Mélinda est là, à le surveiller, et la corde est remplacée par des menottes, plus fiables. Mais ce qui l’étonne le plus c’est que Mélinda connait tout, ou presque de ses agissements durant les trois mois qu’ils viennent de vivre séparés. Il la supplie, désirant inconsciemment la reconquérir, du moins influer sur ce qu’il croit être encore un sentiment d’amour qui animerait Mélinda à son endroit, mais la jeune femme joue au chat et à la souris. Un jeu de rôle qui ne peut que se terminer par la défaite de l’un ou de l’autre, ou des deux.

Prenant tout à tour la parole, un chapitre Lui succédant à un chapitre Elle, ce huis-clos étouffant, angoissant, pathétique, alternant humour noir, et déprime de la part des deux acteurs qui occupent à eux seuls cette scène. Car ce huis-clos est une véritable pièce de théâtre portée par deux protagonistes qui s’affrontent, dans des apartés poignants, des dialogues vifs appelant la contradiction, des mouvements visuels minimalistes, et dont seul l’épilogue ou presque sort de ce vase clos. En 150 pages Jan Jouvert démontre qu’un roman peut être plus fort, plus prégnant lorsque l’intrigue est resserrée, comportant peu de personnages, peu d’action, pas de délayage, dans une unité de temps et de lieu.

Jan Jouvert, qui nous avait proposé en 1999 un roman fort probant Eaux et gaz au Fleuve Noir, est un auteur peu prolifique mais qui fait mouche à chaque fois. Il est également guitariste, rédacteur en chef d’un fanzine consacré au cinéma et scénariste BD.

Paul Maugendre

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