Philippe THIEYRE : Parcours blues en 150 Albums

Collection Formes, éditions Le Mot et le Reste.

 

Philippe THIEYRE : Parcours blues en 150 Albums. Collection Formes, éditions Le Mot et le Reste.

 

Grand frère du jazz, le blues est l’aîné d’une fratrie imposante issue d’une même mère et de pères différents, dont les principaux membres ont été ou sont encore le R’n’B, la soul music, le boogie-woogie, et les cousins du country blues et du rock, en ajoutant une autre déclinaison de la mélopée, le slam. Le blues, tout le monde connait, ne serait-ce que par son accolement à l’état d’esprit d’une personne qui se sent mal dans sa peau, mal dans sa tête, qui a le cafard, qui est déprimé. Et c’est ce sentiment ressenti par les esclaves Noirs Américains issus d’une immigration forcée qui était chanté dans des complaintes proches de la musique ancestrale africaine. Le blues est officiellement né dans le Delta du Mississippi, mais au cours des années il s’est enrichi, proposant une forme musicale plus élaborée, au fur et à mesure que les interprètes et leurs instruments évoluaient.

Dans son introduction Philippe Thieyre décline le blues depuis ses origines, explicitant les différentes transformations de ce genre musical, s’attachant à définir ses choix qui bien évidemment ne reflètent qu’une toute partie de la production musicographique. Puis en cinq chapitres copieux il recense les incontournables représentants, même si ceux-ci ne sont pas forcément connus, du blues vocal et instrumental. Du Pre-war blues : country blues et jazz blues au Blues toujours, en passant par les Années quarante : shouters, combos et rythm’n’blues, Blues urbain et électronique, et British blues, Philippe Thieyre dresse le portrait d’artistes qui ont marqué de leur influence profonde cette musique née d’ailleurs. Evidemment les grands noms du blues, Big Bill Bronzy en tête, les artistes étant classés par ordre alphabétique à l’intérieur de chaque chapitre, Champion Jack Dupree, Robert Johnson, Menphis Slim, Sonny Boy Williamson, Ray Charles, Billie Holiday, Screamin’ Jay Hawkins, Howlin’ Wolf, John Lee Hooker, B.B. King, Ike Turner, pour en arriver à The Animals, Canned heat, Jimi Hendrix, Johnny Winter et ZZ top, sont répertoriés, tous plus ou moins connus du grand public. J’en oublie sciemment ne pouvant tous les citer et ne désirant pas vous dresser un catalogue. Mais des interprètes tels que Clarence Gatemouth Brown, Clifton Chenier, Bill Walter “Shackey” Horton, Lazy Lester, Arthur Big Boy Crudup, Fenton Robinson, ou encore l’étonnant George Coleman qui s’était construit son instrument de percussion à l’aide de vieux bidons d’essence, n’ont les faveurs que des connaisseurs, experts en la matière. Chaque article consacré à un musicien, ou groupe, comporte la reproduction d’une ou deux pochettes de disques, en noir et blanc faut pas être trop exigeant quand même, les dates et lieu de naissance, date et lieu de décès éventuellement, une présentation biographique et le parcours de l’artiste. A chaque fois deux ou trois pages fourmillantes de détails et bien sûr des anecdotes relatives aux enregistrements.

Des notules qui donnent envie de découvrir celui qui se cache sous le sillon des vinyles que l’on peut écouter parfois sur les ondes des radios spécialisées Jazz et Blues, mais rares sont celles-ci qui diffusent nationalement. Les grincheux trouveront peut-être saumâtre de ne pas voir de petits Français dans ce catalogue, mais personnellement je ne regrette pas ce choix, nos artistes, malgré leur valeur tel Paul Personne, et dans un registre moindre Benoît Blue Boy, n’arrivent pas à la hauteur de l’interprétation, mais ce n’est que mon avis personnel.

A la lecture de cet ouvrage on se prend à rêver de pouvoir s’offrir ces galettes qui nous narguent mais pour un provincial il n’est guère aisé de les dénicher. Parfois au bonheur d’un vide-grenier, ou via Internet et des boutiques spécialisées, si l’on dispose des fonds nécessaires, quelques bonnes affaires nous tendent les bras. Alors il ne nous reste qu’à compulser jusqu’à plus soif cet excellent ouvrage et se rabattre sur sa discothèque personnelle, comme moi qui écrit cette notule en écoutant Clarence Brown et son violon et Clifton Chenier et son accordéon accompagné de son frère Cleveland au washboard, et leur musique cajun, le Zydeco. Une référence qui va devenir obligatoire et inéluctable à placer à côté de l’Encyclopédie du blues de Gérard Herzhaft paru en 1990 chez Seghers.

 

Paul Maugendre

 

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